Qu’est ce que le « droit de jouissance spéciale » ?
L’émergence du droit de jouissance spéciale trouve sa source derrière la question suivante : Puis-je me réserver l’un des étages d’un immeuble que je vends afin d’y garder mes bureaux ?
C’est précisément en réponse à ce type de souhait que le droit de jouissance spécial est né. Un notaire a imaginé en 1932, pour l’un de ses clients, l’insertion une clause sur-mesure dans l’acte de vente d’un hôtel particulier permettant au vendeur (fondation Maison de poésie) de pouvoir garder la jouissance du deuxième étage pendant toute la durée de son existence.
Soixante-quinze ans plus tard, cette clause a surgi au grand jour du fait d’un recours de l’acquéreur (SACD) demandant l’expulsion de la fondation et une indemnité pour l’occupation de l’étage sans droit ni titre. Selon la SACD un tel droit ne pouvait, à l’instar d’un droit d’usage ou d’un usufruit, avoir une durée supérieure à trente ans lorsqu’il est constitué au profit d’une personne morale. (Article 619 Code civil).
Au terme d’un marathon judiciaire, la clause a été validée par la Cour de cassation consacrant ainsi définitivement une nouvelle forme de démembrement : le droit de jouissance spéciale
Il en résulte de la position adoptée par la Cour de cassation française que l’on peut constituer par contrat un droit réel de jouissance spéciale qui ne se confond pas avec l’usufruit ou le quasi-usufruit. La Cour de cassation française avalise ainsi les conclusions de l’Association Henri-Capitant publiées en 2008 sur la réforme du droit des biens. Ce faisant, la Cour crée un droit réel original de jouissance spéciale. Ce droit trouve sa source dans le droit de disposition de tout propriétaire incluant la liberté de démembrer à sa guise son droit de propriété.
Le propriétaire peut donc accorder un droit de jouissance spécial dédié à telle ou telle utilisation, et non pas sur la jouissance totale du bien comme dans l’usufruit. La force de cet arrêt réside dans la combinaison de deux principes fondateurs de notre droit, à savoir le droit de propriété et l’autonomie de la volonté.
L’intérêt est évident : disposer d’un outil permettant de faire du sur-mesure, beaucoup plus souple que l’usufruit hérité du Code civil. Un tel droit permet pour l’immobilier de s’adapter à l’économie de partage, collaborative, participative.
L’immobilier se prête naturellement à la mise en œuvre de ce droit, en particulier pour aménager les prérogatives de l’usufruitier. Par exemple, en conférant à ce dernier le droit aux fruits (comme un loyer) une année sur deux, ou trois mois par an. Dans le cas d’une donation : un parent donne un chalet en se réservant l’usufruit pendant dix ans, puis uniquement un droit d’usage pendant les mois d’hiver.
Les applications concrètes du droit de jouissance spéciale
Elles peuvent se décliner selon différents schémas :
- Avec une jouissance alternative : dans le temps, comme celle d’un chalet pendant la saison d’hiver
- Dans l’espace, en permettant le déplacement de l’assiette du droit.
- Ou selon une jouissance partagée : en utilisant par exemple un emplacement de stationnement à certaines heures, pendant quinze ans.
Toute la difficulté sera, pour le notaire, de bien évaluer un tel droit.
Le pourcentage de l’abattement fiscal des rentes viagères perçues par le vendeur peut-il évoluer dans le temps ?
Non, Le pourcentage de l’abattement fiscal reste fixe durant toute la durée du contrat en viager. Si le vendeur a effectué une vente en viager lorsqu’il avait 65 ans par exemple son pourcentage restera à 60%. Son abattement fiscal n’augmentera pas à 70% lorsqu’il arrivera à son 70e anniversaire.
Pour information, la rente viagère est un revenu, et tout revenu en France est soumis à l’impôt. En viager, le vendeur crédirentier bénéficie d’un abattement fiscal sur la rente viagère qu’il perçoit.
Cet abattement fiscal diffère selon l’âge du crédirentier
- 30 % pour le vendeur âgé de moins de 50 ans
- 50 % pour le vendeur âgé de 50 à 59 ans
- 60 % pour le vendeur âgé de 60 à 69 ans
- 70% pour le vendeur âgé de plus de 70 ans
Un nouveau droit réel en France : le droit de jouissance spéciale, Cass. 3e civ., 28 janv. 2015, n° 14-10.013